A la suite de la publication du texte final de l’accord UE-Mercosur, nous avions réalisé en décembre 2024 une première analyse d’une partie des nouveaux textes de l’accord UE-Mercosur. Nous actualisons cette analyse dans une nouvelle note qui insiste sur les points suivants :
1/ L’Accord de commerce ne contient pas de garanties suffisantes pour prévenir les impacts sanitaires et environnementaux attendus du fait de sa mise en œuvre :
- faiblesse de la clause faisant de l’Accord de Paris un élément essentiel de l’Accord UE-Mercosur, qui ne couvre que les cas dans lesquels une partie sortirait de l’Accord de Paris.
- engagement flou et peu contraignant de mettre un terme à la déforestation après 2030.
- dispositions affaiblissant la mise en œuvre du règlement européen sur la déforestation importée.
- absence de mécanisme de sanction pour les violations des dispositions contenues dans le chapitre commerce et développement durable
- absence de clauses miroirs.
2/ L’introduction d’un mécanisme de rééquilibrage des concessions, à la demande des pays du Mercosur, préjudiciable à l’adoption et la mise en œuvre effective de mesures miroirs au sein de l’UE, tout comme dans les pays du Mercosur. Et alors que les fonctionnaires européens assurent qu’il ne s’applique pas aux législations déjà adoptés (comme le CBAM ou l’EUDR) ou prévisibles à la date de la clôture politique des négociations, les négociateurs du Mercosur l’interprètent, dans leur communication officielle, comme un outil permettant de contrecarrer les effets des mesures unilatérales de l’UE (telles que celles découlant du Green Deal) ont sur leurs exportations.
3/L’ accord est contraire aux engagements internationaux de l’UE, en matière climatique et de protection de la biodiversité, ainsi qu’au droit européen. D’où la nécessité de demander à la CJUE d’en examiner la légalité au regard des objectifs de durabilité de l’UE et de ses obligations en la matière découlant du droit européen. Cette voie d’action, possible uniquement avant la conclusion formelle de l’accord au niveau de l’Union, doit être utilisée rapidement.
4/ Le processus de préparation de cet accord constitue un cas d’école en matière de déificit démocratique. Les ultimes négociations ont été menées dans la plus grande opacité et il n’y a toujours pas de transparence sur l’architecture juridique finale de l’Accord. La Commission semble vouloir passer en force pour la ratification. L’Accord UE Mercosur est en effet en principe un accord mixte, comportant un volet commerce et un volet politique. Le Conseil doit donc statuer à l’unanimité, le texte voté au Parlement européen et ratifié dans chacun des Etats membres. Afin de contourner les vétos d’États membres, la Commission semble vouloir découper l’accord pour isoler la partie “commerce” et la présenter sous la forme d’un accord commercial intérimaire relevant de la compétence exclusive de l’UE. Dans ce cas, il serait soumis à l’approbation à la majorité qualifiée des États membres au Conseil et du Parlement européen. En cas d’échec de la ratification de l’accord politique dans un ou plusieurs Etats membres, l’accord de commerce intérimaire resterait en place. Cette méthode irait à l’encontre des conclusions du Conseil du 22 mai 2018.
En tout état de cause, les trois lignes rouges tracées par la France en 2020 sur l’accord restent pertinentes et leur non-respect doit continuer de motiver un rejet définitif de l’accord UE Mercosur.