En février 2022, le rapport « Sensibiliser et former aux enjeux de la transition écologique et du développement durable dans l’enseignement supérieur » de Jean Jouzel appelle à "former 100 % des étudiants de niveau Bac+2, quel que soit leur cursus, d’ici 5 ans" [1]. Il vise à répondre, entre autres, au questionnement des jeunes vis-à-vis de leur capacité à comprendre le changement climatique et à exercer un métier qui contribue réellement à l’adaptation à celui-ci ou à son atténuation.
Le travail du collectif étudiant Pour un réveil écologique, qui a participé à l’élaboration du rapport Jouzel, est un témoignage fort de ce questionnement. Le collectif appelle à une transformation de l’enseignement supérieur pour "donner les bonnes clés à l’ensemble des étudiant·e·s pour qu’ils et elles puissent exercer une activité cohérente avec une société soutenable et désirable" [2].
Ces mobilisations étudiantes font écho à une critique ancienne et répétée de l’enseignement de l’économie [3] qui “manque de recul historique, s’isole en ne se considérant pas comme une science sociale, et réserve une place démesurée à une seule école de pensée” [4] selon le collectif PEPS-Economie (Pour un enseignement pluraliste de l’économie dans le supérieur), fondé en 2011. Ce collectif succède lui-même à des collectifs plus anciens comme Autisme-Economie, et n’est pas une spécificité française : le réseau Rethinking Economics regroupe des associations étudiantes de ce type sur tous les continents, de l’Inde à l’Argentine ou la république démocratique du Congo, en passant notamment par les Etats-Unis ou la France, l’Allemagne.
Ce constat est aujourd’hui actualisé par une étude récente menée par les économistes Arthur Jatteau, Sophie Jallais et Florence Jany-Catrice, selon lesquels : “alors que le fonctionnement de nos économies est responsable du réchauffement climatique, la question de la transition écologique et plus généralement les questions écologiques et sociales sont spectaculairement absentes de l’offre de formation de licence économie-gestion quasiment partout en France. Quand elles sont offertes, c’est de manière marginale” [5].
Pour combler ce manque, des manuels comme celui écrit par le Campus de la transition Déverrouiller l’économie (Les Liens qui Libèrent, 2023) vise à donner des clés d’analyse au-delà de l’économie standard ou même de l’économie de l’environnement, qui "s’est construite sur une conception instrumentale de la nature qui fait d’elle un réservoir inépuisable de ressources" [6].
Parmi les préconisations du rapport Jouzel, on trouve la formation de groupes de travail par filières censés décliner le socle commun de connaissances sur l’écologie à chaque discipline. Pourtant, l’utilisation des outils économiques standards en économie de l’environnement soulève de nombreuses critiques parmi les économistes : fermeture disciplinaire, focalisation sur la valorisation monétaire et calcul coût-bénéfices, ignorance des flux énergie-matière, minimisation des coûts du changement climatique [7] [8] [9]. Lui est opposée l’économie écologique, un courant interdisciplinaire décrivant l’économie comme un système encastré dans la biosphère.
Faut-il fondamentalement transformer l’enseignement de l’économie pour l’adapter aux enjeux écologiques ? Si oui, comment ? Quelles initiatives peuvent inspirer une telle démarche ?
Le CERES et l’institut Veblen, vous invitent à en débattre le 18 octobre à la Paris School of Economics (inscription obligatoire).
Par ailleurs, les inscriptions au Prix Veblen des mémoires de M2 se terminent bientôt pour l’année 2022-2023, n’hésitez pas à candidater !