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L’évaluation des impacts de l’accord UE/Mercosur reste lacunaire

Mathilde Dupré, 8 août 2020

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Un projet de rapport final de l’étude d’impact sur le développement durable de l’accord de commerce entre l’UE et le Mercosur a été publié au début du mois de Juillet. Après avoir analysé ce rapport, l’Institut Veblen, ClientEarth, Conservation International et Fern ont transmis à LSE Consulting et à la Commission européenne une contribution sur les insuffisances de ce projet de rapport final. Si certaines sections ont été renforcées, le contenu de cette étude d’impact reste lacunaire sur des points essentiels de l’accord et repose sur des données qui ne reflètent pas les dernières tendances en matière de déforestation par exemple ou de violations des droits humains.

Nos principales recommandations :
  • Les recommandations de l’étude d’impact devraient tenir compte du fait que les négociations ont été conclues il y a un an et devrait donc examiner comment la Commission pourrait intégrer les conclusions de l’étude à ce stade du processus.
  • Les recommandations doivent aller au-delà de simples mesures correctives au niveau national et explorer comment l’accord d’association lui-même devrait être utilisé comme une incitation à les mettre en œuvre.
  • Les conclusions et recommandations de l’étude d’impact doivent être basées sur les dernières données disponibles et prendre en compte les tendances les plus récentes, lorsqu’elles sont documentées.

Comme le souligne la communication de la Commission européenne intitulée Le commerce pour tous, " Les analyses
et les évaluations d’impact sont cruciales pour l’élaboration de politiques commerciales solides, transparentes et fondées sur des données concrètes". L’objectif principal d’une étude d’impact est d’informer les négociateurs commerciaux et les autres parties prenantes sur les impacts économiques, sociaux et environnementaux d’un accord commercial, pendant qu’il est en cours de négociation.
Dans le cas de l’accord d’association entre l’UE et le Mercosur, les négociations ont été clôturées le 28 juin 2019. Dès lors, on est en droit de s’interroger sur la portée réelle de cette étude d’impact. Avec un projet de rapport final publié plus d’un an après la clôture des négociations, comment ce processus a t-il alimenté le travail des négociateurs ? C’est notamment le cas pour les recommandations politiques et les mesures d’accompagnement, qui n’ont été incluses que dans le projet de rapport final publié en juillet 2020. Tous les délais initialement annoncés ont été largement dépassés. Ces retards ont contribué à ce que l’étude d’impact ne répondent pas aux diverses exigences du mandat et du manuel de l’étude d’impact sur le commerce. C’est d’ailleurs pourquoi l’Institut Veblen, la Fondation Nicolas Hulot, Client Earth, Fern et la Fédération Internationale des droits de l’Homme ont déposé une plainte auprès de la médiatrice de l’UE le 15 juin 2020.

En outre, la modélisation du projet de rapport intermédiaire est toujours basée sur deux scénarios : conservateur et ambitieux. Étant donné que les termes définitifs de l’accord commercial sont connus depuis plus d’un an, l’étude d’impact devrait tenir compte de ces termes pour refléter correctement les effets potentiels sur la soutenabilité, et contribuer ainsi au débat public autour du processus de conclusion et de ratification de l’accord. Par exemple, des recommandations telles que "L’UE devrait envisager l’utilisation de quotas et une libéralisation partielle pour minimiser l’impact dans des secteurs tels que la viande bovine, la volaille et le sucre" (p. 37) apparaissent déjà complètement dépassées. Elles devraient être adaptées à l’actuelle situation, par exemple en évaluant les impacts des quotas déjà définis dans l’accord.

Enfin, les recommandations devraient aller au-delà de simples mesures correctives au niveau national et explorer comment l’accord d’association devrait être utilisé comme une incitation à leur mise en oeuvre effective. Par exemple, la première étude d’impact sur le développement durable de 2009 mentionnait la possibilité d’introduire le respect d’un ensemble de critères de durabilité comme condition à la réduction des droits de douane.

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