Le Parlement européen réuni en plénière le 13 septembre a adopté à une large majorité (453 pour, 57 contre, 123 abstentions) une version du texte bien plus ambitieuse que celles proposées par la Commission dans son projet de novembre 2021 et le Conseil dans son orientation générale de juin dernier. Certaines propositions portées par l’Institut Veblen ont ainsi été introduites dans le projet de réglement.
Le texte voté comporte en effet plusieurs avancées :
- Le champ des produits concernés est élargi. Le Parlement complète la liste très restrictive de la Commission (limitée au soja, café, cacao, bois, bœuf et huile de palme) et y ajoute les viandes de porcins, de volailles, d’ovins et de caprins, les dérivés d’huile de palme, le caoutchouc, le maïs, le charbon de bois et les produits en papier imprimé. Cette liste pourra être étendue, le Parlement souhaitant que la Commission soit habilitée à adopter des actes délégués afin d’inclure d’autres produits.
- Le secteur financier entre dans le champ d’application de la réglementation. Il était en effet indispensable de faire peser des obligations sur les établissements financiers qui peuvent financer des entreprises directement ou indirectement responsables de la déforestation.
- Au-delà des forêts, le texte protège d’autres écosystèmes naturels, comme les savanes. Certaines organisations regrettent toutefois l’absence de prise en compte d’autres écosystèmes comme les zones humides ou les prairies.
- Sont désormais visées, à côté de la déforestation, la dégradation des forêts et la conversion de forêts ou d’autres surfaces boisées pour en faire un usage agricole ou des forêts de plantation.
- Autre avancée portant sur l’application temporelle du règlement : si la proposition de la Commission ne visait la déforestation n’ayant eu lieu qu’après le 31 décembre 2020, le texte du Parlement porte cette date au 31 décembre 2019. Mais cela reste bien moins ambitieux que ce que le Parlement recommandait dans sa résolution de 2021, à savoir de fixer cette date à 2015.
- Les exigences en matière de traçabilité sont renforcées : le texte contient en effet des règles permettant d’identifier l’origine des produits jusqu’à la parcelle. Il est en outre prévu que la Commission publie, un an après l’entrée en vigueur du règlement, des lignes directrices en matière de traçabilité précisant les règles applicables aux opérateurs et adaptées à leur chaîne d’approvisionnement respectives.
- Un mécanisme de sanctions plus robuste : en cas d’infractions graves ou répétées les États membres pourront notamment interdire la mise sur le marché de l’UE, la mise à disposition, ou l’exportation à partir de l’UE, de produits. Il est aussi prévu que la Commission publie la liste des opérateurs et des commerçants qui ne respectent pas les obligations du règlement, ainsi que les sanctions qui leur sont imposées.
- Enfin, une meilleure prise en compte des pays producteurs et des petits exploitants : le texte du Parlement appelle la Commission et les États membres à renforcer les partenariats et les mécanismes de coopération et à prévoir des aides financières de sorte que les petits exploitants puissent opérer une transition vers des pratiques agricoles et forestières durables et se conformer aux exigences de la règlementation européenne.
Le texte adopté par le Parlement européen n’est pas la version finale du règlement qui sera mis en œuvre. Et il faut maintenant espérer que les avancées qu’il contient ne soient pas détricotées lors de son examen en trilogue (discussions entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission) prévu pour cet automne.