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« Le vote des sénateurs contre le CETA sanctionne un quadruple échec de la politique commerciale européenne »

Le rejet justifié du CETA montre que les traités de commerce doivent désormais être négociés en fonction des objectifs de transition énergétique et de préservation de la biodiversité, estime l’économiste Mathilde Dupré.

Publié le 12 avril 2024 à 12h00, modifié le 12 avril 2024 à 15h51 Temps de Lecture 3 min.

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Le rejet par le Sénat de l’accord économique et commercial global (CETA) entre l’Union européenne (UE) et le Canada était prévisible de longue date. A la fois peu utile pour l’économie et nocif pour l’environnement, le CETA suscite de nombreuses oppositions en Europe depuis plus de dix ans. Mais la France et l’UE ont besoin d’amitiés solides sur la scène internationale. Après un tel camouflet, elles doivent réinventer d’urgence d’autres formes d’alliance. En tant que pays hôtes de l’accord de Paris sur le climat et du cadre mondial de la biodiversité de Kunming à Montréal, la France et le Canada gagneraient à tracer ensemble les contours d’un partenariat économique innovant, visant notamment la réduction des échanges de biens et de services incompatibles avec ces accords multilatéraux sur l’environnement.

Le vote des sénateurs sanctionne un quadruple échec de la politique commerciale européenne. Un échec démocratique : les négociations ont été menées dans le plus grand secret entre 2009 et 2014, sans possibilité, pour les parties prenantes, de contribuer au contenu du futur accord. Puis le processus de ratification a été ubuesque : certains Parlements nationaux devant voter sur la ratification du texte plus de six ans après le début de son application provisoire !

Un échec écologique : la politique de libéralisation des échanges, sans considération pour leur impact écologique, favorise par exemple les exportations européennes de pesticides interdits dans l’UE et les importations de produits agricoles canadiens traités avec ces mêmes substances. Par ailleurs, le Canada a régulièrement utilisé les mécanismes de « dialogue » instaurés par l’accord pour tenter de bloquer ou de ralentir la mise en œuvre des réformes du Green Deal, telles que le règlement sur la déforestation importée.

Lire aussi l’éditorial du « Monde » | Libre-échange : faire preuve de discernement

Un échec économique ensuite : les effets de l’accord sont relativement imperceptibles sur le volume des échanges. Les exportations européennes vers le Canada ont augmenté de seulement 0,7 % entre 2017 et 2022, contre 34 % pour les cinq années précédentes. Les échanges qui ont connu les plus fortes progressions concernent des secteurs polluants tels que les combustibles fossiles, les engrais, les produits plastiques, les véhicules, les produits chimiques, le fer, l’acier, l’aluminium, le nickel, les transports et le tourisme.

Désapprobation constante

Un échec enfin de l’intérêt général face aux intérêts des grosses entreprises. Selon Mark Camilleri, président de l’association Canada-UE pour le commerce et les investissements, et membre de l’équipe de négociation du CETA, les dispositifs de dialogue et de coopération réglementaire « institutionnalise[nt] l’opportunité pour les entreprises canadiennes de profiter au maximum du CETA en ayant un rôle dans la prise de décision au niveau de l’UE ». En cas de ratification complète, les investisseurs étrangers bénéficieraient d’une voie de recours contre les Etats quand ces derniers adoptent des politiques qui nuisent à leurs intérêts, y compris leurs activités fossiles. Ce mécanisme d’arbitrage d’investissement a été jugé à la fois inutile et dangereux par les experts mandatés par le premier ministre en 2017. La France vient précisément de quitter le traité sur la charte de l’énergie pour cette raison.

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