- Une étude menée par le BASIC met en lumière l'impact des importations agricoles en France sur les droits humains et l'environnement.
- Cacao, café, riz ou huile de palme… certains "cachent des réalités préoccupantes", pointe le document publié jeudi.
- Face à ces données, 3 organisations appellent à renforcer les exigences pour les produits importés sur le marché européen.
Alerter sur des "réalités souvent méconnues"
derrière la consommation de certains produits importés. C'est le but d'une étude publiée jeudi 17 avril (nouvelle fenêtre) et réalisée par le BASIC pour Max Havelaar France, l'Institut Veblen et Greenpeace France. Intitulée "Consommation française de produits agricoles importés : quels impacts, quelles solutions", elle classe certains des produits les plus populaires dans l'Hexagone en fonction de leur impact sur l'environnement, le climat, mais aussi les droits humains.
"L’empreinte écologique des importations françaises est considérable : filières gourmandes en eau,
déforestation liée à l’extension des terres agricoles
(nouvelle fenêtre), pollution des eaux, émissions de gaz à effet de serre… Ces filières d’importation sont également souvent associées à des violations des droits fondamentaux des travailleurs"
, pointe l'étude qui cite notamment "l'accaparement des terres"
ou le "
travail des enfants
(nouvelle fenêtre), travail forcé et salaires ou revenus insuffisants"
.

Enseignements de cette étude : six filières majeures (cacao, vanille, riz, huile de palme, sucre de canne et café) concentrent les violations des droits humains. Celles concernant la vanille, l'huile de palme, le sucre de canne, le jus d'orange, le riz et le cacao impliquent des salaires trop bas : les travailleurs y perçoivent moins de 60% d'un revenu vital. Enfin, le cacao et le soja concentrent les impacts majeurs sur l'environnement et le climat via d'importants taux de déforestation et de pollution des eaux.
Le cacao et le café pointés du doigt
Dans le détail, les trois pires produits concernant la déforestation sont le soja (principalement cultivé au Brésil), l'huile de palme (Asie du Sud-Est) et le cacao (Afrique de l'Ouest). Des cultures "souvent implantées dans des zones anciennement forestières, dont les surfaces sont rasées ou brûlées pour créer des monocultures à haut rendement",
pointe l'étude du BASIC. Le soja entraîne notamment une perte massive de biodiversité et accélère l'érosion et l'appauvrissement des sols.
Concernant les émissions de gaz à effet de serre, le Top 3 change quelque peu : cacao, soja et café. Un trio qui arrive également en tête et dans cet ordre concernant les problématiques de pollution de l'eau, en raison de l'utilisation d'engrais et de pesticides "qui contaminent les nappes phréatiques, les rivières et les lacs via le ruissellement ou l'infiltration"
. Le café est "l'une des cultures agricoles les plus consommatrices d'intrants chimiques"
, pointe le BASIC. Sur la consommation d'eau, les pires productions sont celles de soja, de riz et de jus d'orange.
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Concernant les droits humains, le café, le cacao et le sucre de canne sont les produits pour lesquels le plus de cas travail des enfants et travail forcé ont été documentés, devant le riz, l'huile de palme et la vanille puis la noix de cajou qui arrive en troisième place sur ce podium particulièrement fourni. Pour le cacao, l'étude de BASIC estime à 1,5 million le nombre d'enfants travaillant dans des conditions dangereuses en Afrique de l'Ouest. Concernant les faibles revenus, les pires produits sont la vanille, l'huile de palme et le sucre de canne.
Pour la vanille, principalement cultivée à Madagascar - qui en assure 50% de la production mondiale et 84% des importations françaises -, la majorité des travailleurs de la filière ne perçoivent que 40% de la somme nécessaire pour atteindre un niveau de vie décent - soit le revenu nécessaire pour couvrir les besoins essentiels d'une famille.
Autres produits problématiques pour l'environnement, le climat et les droits humains : la banane, fruit le plus consommé en France, mais aussi l'avocat lié à une consommation d'eau élevée, la déforestation et la perte de biodiversité. La noix de cajou, cultivée notamment en Côte d'Ivoire, au Bénin et au Burkina Faso, est quant à elle mise en cause pour les conditions de travail en raison de l'exposition des travailleurs à l'acide contenu dans sa coque, tandis que la filière thé est marquée "par des inégalités sociales profondes"
et que les tomates importées hors saison en France correspondent à de "faibles salaires, des contrats instables, une exposition aux produits chimiques et un manque d'accès aux droits fondamentaux".
Mieux réguler les importations et rejeter le Mercosur
Face à ce constat, les ONG appellent à mettre en œuvre les textes européens pour mieux réguler les importations de ces produits et assurer une meilleure traçabilité des denrées, notamment la RDUE (le règlement contre la déforestation), le CS3D (directive sur le devoir de vigilance des entreprises) et le règlement Travail Forcé (interdiction d'entrée sur le marché pour les produits issus de l'esclavage moderne). "L'analyse montre que ces textes, s'ils sont bien combinés, couvrent l'ensemble des enjeux identifiés par l'étude"
, pointe le rapport qui précise qu'ils "ont un potentiel d'amélioration majeur, à condition que leur mise en œuvre soit rigoureuse, contrôlée et ambitieuse"
.
Par ailleurs, Greenpeace, Max Haavelar France et l'Institut Veblen appellent à rejeter l'accord Mercosur, le traité de libre-échange avec l’Amérique latine, "incompatible avec les objectifs européens de justice sociale et climatique"
. Les organisations estiment qu'en l'état, "il ne garantit ni la protection des droits humains, ni celle de l'environnement"
.