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Jézabel Couppey-Soubeyran : « A qui profitent les pertes des banques centrales ? »

Techniquement, des fonds propres négatifs ne posent pas de problème à une banque centrale, mais l’affaire mérite, politiquement, qu’on y regarde de plus près, affirme l’économiste dans sa chronique.

Publié le 22 avril 2023 à 05h00, modifié le 22 avril 2023 à 05h00 Temps de Lecture 3 min.

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Nombre de banques centrales, dont celles de l’Eurosystème, enregistrent depuis plusieurs mois des pertes inédites qui pourraient encore se creuser si la hausse des taux se poursuit. Est-ce grave ? Cela le serait si les banques centrales ne pouvaient se permettre de fonctionner à perte, avec des fonds propres négatifs. Or, les banques centrales ne sont ni des entreprises ni des banques commerciales. Donc ne dramatisons pas les pertes actuelles des banques centrales, mais demandons-nous à qui elles profitent. A la société dans son ensemble ou au secteur bancaire seulement ?

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Ces pertes proviennent des masses de liquidités que les banques centrales ont dû créer pour surmonter la crise financière de 2007-2008 puis la crise sanitaire de 2020, en les prêtant aux banques à taux très bas (voire à taux négatifs) ou en leur achetant des titres dans le cadre des programmes d’assouplissement quantitatif (quantitative easing). Les banques commerciales ont accumulé ces liquidités sous forme de réserves à la banque centrale. Actuellement, celles de la zone euro disposent encore de 4 173 milliards d’euros de réserves sur leurs comptes courants à la Banque centrale européenne (BCE), composées pour une petite part de réserves obligatoires (155 milliards) et, pour le reste, de « facilités de dépôt », que la banque centrale rémunère.

Or, en réponse à l’inflation, la BCE, comme les autres banques centrales, a relevé ses taux directeurs, qui sont précisément ceux auxquels elle prête aux banques et rémunère leurs dépôts mis en réserve. Ainsi, les liquidités que les banques ont empruntées à la BCE à un taux nul voire négatif jusqu’à mi-2022 leur rapportent désormais 3 % pour les facilités de dépôt et 3,5 % pour les réserves obligatoires. Soit environ 125 milliards d’intérêts par an payés par la BCE…

Subvention indue

Dans le même temps, parce qu’elles ont moins besoin de liquidités, que les taux ont grimpé et qu’elles ont remboursé une partie de leurs anciens emprunts, les banques de la zone euro ont réduit presque de moitié par rapport à 2021 l’encours de leurs emprunts à la BCE. Celle-ci, comme beaucoup d’autres banques centrales, verse donc aux banques beaucoup plus d’intérêts qu’elle n’en reçoit. D’où ces pertes qui pourraient atteindre au total pour l’Eurosystème jusqu’à 600 milliards d’euros, d’après Daniel Gros, membre du directoire du Centre for European Policy Studies, cité par le Financial Times.

Est-il bien raisonnable qu’une banque centrale doive payer pour un service (de liquidité) qu’elle fournit aux banques, s’interrogeaient les économistes Paul de Grauwe et Yuemei Ji dans les colonnes de Vox-EU en janvier ? Avant l’entrée en fonctions de la BCE, en 1999, la plupart des banques centrales nationales ne le faisaient pas, hormis la Bundesbank allemande, qui a insisté, précisent-ils, pour que la BCE s’aligne sur sa pratique. La Réserve fédérale américaine ne le fait que depuis 2008. Les deux auteurs y voient une forme de subvention indue aux banques commerciales, au détriment des Etats (la plupart des banques centrales nationales de la zone euro ayant l’Etat comme actionnaire) à qui reviennent normalement les revenus issus de la création monétaire par la banque centrale (le « seigneuriage »).

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