Pourra-t-on continuer de financer massivement la production d’énergies fossiles, la déforestation, la pollution des sols et la destruction des écosystèmes ? Pourra-t-on poursuivre les investissements dans des entreprises sans se soucier du respect des droits humains et du travail ? Ou encore vendre des services et produits incompatibles avec l’urgence climatique ?
Alors que l’Union européenne (UE) planche sur ces questions depuis deux ans, la France fait actuellement pression pour amoindrir la directive sur le devoir de vigilance.
En février 2022, la Commission européenne a présenté sa proposition de directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (« Corporate Sustainability Due Diligence Directive », CSDDD). Cette proposition, inspirée de la loi française relative au devoir de vigilance, vise en effet à rendre les acteurs économiques et financiers responsables de leurs activités sur l’ensemble de leur chaîne de valeur dans le monde.
La directive doit ainsi permettre d’éviter de nouveaux drames comme celui du Rana Plaza en 2013, où l’effondrement de l’usine bangladaise avait causé la mort de plus d’un millier de personnes travaillant pour l’industrie du textile.
Prétendue méconnaissance
Conscient des enjeux, le Parlement européen a voté, en juin 2023, une version du texte plus ambitieuse que celle qui avait été initialement présentée par la Commission. Pour les députés européens, le débat est clos : les institutions financières, telles que les banques ou les sociétés d’assurances, doivent exercer un devoir de vigilance sur les services qu’elles procurent.
Désormais, les grandes entreprises ne pourront plus jouer l’innocence et se cacher derrière une prétendue méconnaissance de ce qu’il se passe sur leur chaîne de valeur. Mercredi 22 novembre, le trilogue (Commission, Parlement et Conseil européens) devrait justement décider, ou non, de l’inclusion des acteurs financiers dans cette directive.
Il faut rappeler ici l’importance de la responsabilité des acteurs financiers dans le changement climatique. Entre 2015 et 2022, les soixante plus grandes banques mondiales ont financé l’industrie fossile à hauteur de 5 500 milliards de dollars (environ 5 035 milliards d’euros), alors même que l’urgence climatique était connue de tous.
Au-delà de leurs soutiens climaticides au charbon, au pétrole et au gaz, les banques, assureurs, investisseurs et gestionnaires d’actifs restent massivement impliqués dans des activités ayant de graves répercussions sur les droits humains et l’environnement.
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