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TribuneÉnergie

La France doit sortir du Traité sur la charte de l’énergie

Des activistes opposés à la politique pro-gaz et pro-nucléaire du gouvernement, réunis le 14 décembre 2021 à Paris.

Dans une lettre, une trentaine d’organisations de la société civile demandent aux membres du gouvernement de sortir la France du Traité sur la charte de l’énergie. Ce texte climaticide plombe la transition écologique.

Article mis à jour le 21 octobre à 17 heures : Emmanuel Macron a annoncé le 21 octobre que la France allait se retirer du Traité sur la charte de l’énergie.



Le gouvernement français va devoir se prononcer d’ici à mi-novembre sur le maintien de la France au sein du très décrié Traité sur la charte de l’énergie, ce traité nocif qui retarde, renchérit ou bloque la transition énergétique. Alors que le Haut Conseil pour le climat vient de publier un avis qui recommande « un retrait coordonné du TCE et par la France et les États membres de l’UE », que l’Espagne, les Pays-Bas et la Pologne viennent d’annoncer s’en retirer — après l’Italie dès 2016 — et que la France est désormais poursuivie par un investisseur allemand au titre du TCE, plus d’une trentaine d’organisations de la société civile écrivent à plusieurs ministres du gouvernement pour les appeler à ce que la France se retire au plus vite du Traité sur la charte de l’énergie et vote contre le projet de TCE rénové lors du prochain vote du Conseil des ministres de l’UE. À quelques semaines de la COP27 sur le climat (6-18 nov), et alors que le Giec [1] a mis à l’index le TCE comme un frein aux politiques climatiques ambitieuses, les organisations invitent également toutes celles et ceux qui le souhaitent à se joindre à cette action en envoyant la même lettre par cet outil électronique.



Le 19 octobre 2022,

Destinataires :

Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances
Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique
Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique
Olivier Becht, ministre délégué au commerce extérieur
Laurence Boone, secrétaire d’État chargée de l’Europe


À l’heure où la catastrophe climatique s’aggrave, les tensions géopolitiques s’accentuent et les prix de l’énergie s’envolent, comment la France pourrait-elle rester membre d’un traité, le Traité sur la charte de l’énergie, qui retarde, renchérit ou bloque la transition énergétique d’ampleur dont le besoin et l’urgence se font sentir de toute part ? Comment accepter de rester membre d’un traité qui permet à des industriels de poursuivre des États pour leurs politiques de fermeture de centrales au charbon (Pays-Bas), d’interdiction de forages pétroliers (Italie), de restriction sur l’utilisation des techniques d’exploitation les plus néfastes (Slovénie), ou d’adaptation des mesures de soutien aux énergies renouvelables (Espagne, France) [2] ?

Cela fait désormais de nombreuses années que nos organisations alertent quant aux dangers que représente le Traité sur la charte de l’énergie [3], et plus d’un million de personnes en Europe ont signé une pétition pour demander l’UE et les États membres à se retirer du TCE [4]. Après avoir été menacée de poursuites au moment de l’examen de la loi Hulot sur les hydrocarbures, au point que celle-ci soit édulcorée, la France est désormais poursuivie par un investisseur allemand suite à la révision à la baisse des tarifs d’achat de l’électricité photovoltaïque, décidée en 2020 [5]. La France va-t-elle rester sans réagir face à ce traité nocif tant pour la transition énergétique que pour la capacité des pouvoirs publics de réguler finement le secteur ? Nos organisations invitent toutes celles et ceux que ce Traité révolte à nous rejoindre pour appeler solennellement le gouvernement français à ce que la France :

  • se retire du Traité sur la charte de l’énergie ;
  • vote contre le projet de nouveau Traité sur la charte de l’énergie lors du prochain vote du Conseil des ministres de l’UE ;
  • intervienne pour empêcher l’intégration d’autres pays du Sud à ce Traité nocif.

Signé en 1994 et entré en vigueur en 1998, le TCE est un vestige du passé : il visait à encourager et à protéger les investissements directs étrangers (IDE) dans le secteur de l’énergie, en particulier dans les pays de l’ex-Union soviétique. Trente ans plus tard, cela n’a plus aucun sens : alors que l’urgence climatique impose une fermeture accélérée d’un certain nombre d’infrastructures fossiles existantes et une régulation fine du secteur de l’énergie, le TCE fragilise considérablement la capacité des pouvoirs publics à assurer à la fois la sécurité énergétique et climatique des populations. Les principes qui fondent le TCE (protection des investisseurs, non-prise en compte des enjeux climatiques, etc.) ne tiennent aucun compte des immenses défis climatiques et énergétiques auxquels nous sommes confrontés.

Face aux critiques, l’Union européenne a consenti à accepter un processus de modernisation du TCE. Après plusieurs années de négociations, loin de régler les problèmes soulevés, ce traité modernisé prévoit de prolonger la protection des investissements dans les énergies fossiles sur une trop longue période, ainsi que d’étendre la protection des investisseurs à de nouveaux investissements dans l’énergie (captage et stockage du carbone, biomasse, hydrogène, combustibles synthétiques, etc.), et donc, les risques de litiges. Alors que ces nouvelles dispositions pourraient être entérinées d’ici mi-novembre par le Conseil de l’UE, puis lors d’une conférence des États membres du TCE le 22 novembre prochain, il est plus que nécessaire que le gouvernement français annonce voter contre ce nouveau TCE et, en suivant l’exemple d’autres pays européens tels que l’Espagne, se retire du TCE.

Veuillez recevoir l’expression de nos plus sincères salutations.


Organisations signataires :

350.org
Action Non-Violente COP21
ActionAid France
Aitec
Amis de la Terre
Alofa Tuvalu
Alternatiba
Attac France
Bloom
CADTM France
CCFD-Terre Solidaire
Comité Pauvreté et Politique
Confédération paysanne
Droit au logement
Emmaüs International
Énergie de Nantes
Escape-jobs
France Nature Environnement
GAFE-FRANCE
Générations futures
GERES
Greenpeace
Institut Veblen
LDH (Ligue des droits de l’Homme)
Les Amis du monde diplomatique
Makesense
Notre affaire à tous
Reclaim Finance
Réseau Roosevelt IDF
Sherpa
Union syndicale Solidaires
Pour un réveil écologique
Unis pour le climat et la biodiversité
Youth For Climate

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