France Relance : un plan entre tempo politique et urgence économique

France Relance, le logo du plan de relance ©AFP - Ludovic Marin
France Relance, le logo du plan de relance ©AFP - Ludovic Marin
France Relance, le logo du plan de relance ©AFP - Ludovic Marin
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Entre réponse à la crise économique engendrée par l’épidémie et positionnement politique de fin de mandat, quels sont les contours du plan, nommé “France Relance” ?

Avec
  • Christian Saint-Etienne Professeur émérite titulaire de la Chaire d'économie industrielle au Conservatoire National des Arts et Métiers
  • Jézabel Couppey-Soubeyran Maîtresse de conférences en économie à l’université Paris-I, conseillère scientifique à l’Institut Veblen

Le plan de relance français, attendu depuis le printemps a été présenté la semaine dernière. Il a pour objectif de retrouver le niveau de croissance de 2019 d'ici la fin de l'année 2022. Pour y parvenir, le gouvernement a mis au point 70 mesures. Elles se répartissent selon trois piliers : la transition énergétique, la relocalisation industrielle et la cohésion sociale et territoriale. Il sera piloté par un outil de prospective d’après guerre, le Haut-Commissariat au plan, ressuscitant l’idée chère à Jean Monnet, son premier commissaire :  « Modernisation ou décadence »

Pour en parler, nous recevons :

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Jézabel Couppey-Soubeyran, économiste, maître de conférences à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et conseillère scientifique à l’institut Veblen, auteur de L’économie en BD, Casterman

Christian Saint-Étienne, économiste universitaire, auteur de « Le libéralisme stratège contre le chaos du monde » (Odile Jacob, 2020) 

A quoi ressemble le plan de relance ? 

C’est un plan qui s'articule autour de trois volets. On a 30 milliards sur l’écologie, 34 milliards sur la compétitivité et 36 milliards sur la cohésion. On a l’impression d’avoir un plan de relance équilibré. Mais quand on regarde plus en détail, on s'aperçoit qu’il y a un manque de cohérence et de sincérité à refonder le modèle économique et à préparer la France de 2030. Jézabel Couppey-Soubeyran

"Il faut inscrire le plan dans la durée. C’est au fond le second temps de réponse de ce gouvernement face à la crise. C’est un plan structurel là où les Français attendaient plus un plan conjoncturel. On est plus dans un plan de transformation de l’économie." Christian Saint-Étienne

Un plan de relance destiné aux entreprises ? 

"C’est un plan qui est très orienté vers l’offre, vers le soutien des entreprises et pas assez vers la demande. C'est un plan qui repose sur une conception très étroite de l'offre. Ça ne considère que le secteur privé, il faut davantage d’investissements publics. Ce n’est pas suffisamment orienté sur la demande. Soutenir la demande si l’on veut faire repartir l’offre et la production, c’est fondamental." Jézabel Couppey-Soubeyran

C’est le deuxième temps d’un plan. Je pense qu’il y aura un troisième temps au début de l’année 2021 avec des mesures spécifiques aux ménages. Je pense que ça sera plus facile d’aider les ménages lorsque nous y verrons plus clair. Aujourd’hui, nous sommes dans une incertitude totale. Dans cette incertitude majeure, il est important que le gouvernement soutienne les entreprises pour éviter un effondrement de l’économie. Christian Saint-Étienne

Il faut essayer de tout coordonner, avoir un plan qui porte à la fois sur l'offre, en aidant les entreprises, mais en aidant également le secteur public en investissement beaucoup plus massivement dans le secteur public. Mais aussi, aider les ménages, avoir une volonté très affichée qui se poursuit dans le temps en ce qui concerne, l'écologie, pour arriver à véritablement refonder notre modèle économique. Et là, nous avons un plan de refondation. Pour le moment, c'est juste un plan de continuité avec cette politique de l'offre. Jézabel Couppey-Soubeyran

Transformer l'économie par l'emploi 

" On annonce une baisse de 10% du PIB français pour l'année 2020. Alors, il faut se garder de l'idée que c'est -10 % pour tout le monde. Ce qui se passe en réalité c'est que c'est -10% en moyenne. Mais vous avez 20 ou 30% des entreprises pour lesquelles ça va faire +10 ou +15%. Ensuite, si on part de l'idée qu'il y a 20% des entreprises qui sont en plein boom, vous allez avoir 60% des entreprises qui vont faire moins 10%. Mais les derniers 20% vont être restructurés. Il y a des boîtes qui vont fermer, alors on a une nécessité très lourde à gérer pour la France dans cette transformation. On va devoir transférer autour de 1.5 millions de travailleurs des secteurs en déclin où des entreprises qui ferment vers les autres secteurs." Christian Saint-Étienne

La délicate interrogation quant au remboursement de la dette 

" Les États font ce qu'on appelle un roulement de la dette, il roule leur dette, c'est-à-dire qu'il rembourse leurs dettes passées avec des dettes nouvelles. Est-ce que tous les États de la zone euro seront en capacité de rouler leurs dettes sans difficulté ? Ça dépendra de l'action de la banque centrale européenne. Et ça signifie que la BCE, désormais, s'engage sur un horizon de temps extrêmement long à être toujours là pour garantir aux investisseurs de leur acheter la dette." Jézabel Couppey-Soubeyran

Vous pouvez (ré)écouter l'interview en intégralité en cliquant sur le player en haut à gauche de cette page.

Le Journal de l'éco
6 min

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