Comment mettre l’entreprise au service de l’intérêt général ? : épisode • 4/5 du podcast Quel avenir pour l’entreprise ?

Selon Dominique Méda : "Depuis plusieurs décennies le modèle dit 'shareholder' selon lequel la firme serait au seul service des actionnaires est concurrencé par le modèle dit 'stakeholder'. ©Getty - Stockbyte, BCN_025, Libre de droits
Selon Dominique Méda : "Depuis plusieurs décennies le modèle dit 'shareholder' selon lequel la firme serait au seul service des actionnaires est concurrencé par le modèle dit 'stakeholder'. ©Getty - Stockbyte, BCN_025, Libre de droits
Selon Dominique Méda : "Depuis plusieurs décennies le modèle dit 'shareholder' selon lequel la firme serait au seul service des actionnaires est concurrencé par le modèle dit 'stakeholder'. ©Getty - Stockbyte, BCN_025, Libre de droits
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L’idée que l’entreprise aurait pour unique responsabilité d’augmenter les profits des actionnaires est de plus en plus remise en cause. Quelles sont les alternatives ?

Depuis plusieurs décennies le modèle dit "shareholder" selon lequel la firme serait au seul service des actionnaires est concurrencé par le modèle dit "stakeholder" : dans celui-ci, les autres parties prenantes (employés, sous-traitants, fournisseurs, clients, collectivités, etc.) sont en droit de demander des comptes et de participer au partage de la valeur. En effet, d’une part, les exigences de rendement des actionnaires sont de plus en plus souvent jugées néfastes dans la mesure où elles inciteraient les dirigeants à privilégier une rentabilité à court terme, à réduire les investissements et à comprimer la masse salariale. D’autre part, on considère que les entreprises ne peuvent plus ignorer les conséquences sociales et environnementales de leurs actions.

Le Bien commun | 13-14
30 min

Depuis la fin des années 1990, la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) est donc promue - notamment par les organisations internationales. Elle s’entend comme "l'intégration volontaire des préoccupations sociales et écologiques des entreprises à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes" et fait l’objet de multiples normes, labels et référentiels qui visent à mesurer leur implication. En France, les lois Grenelle I et II ont ainsi renforcé les obligations de publication des entreprises en matière de RSE. En 2019, à la suite du rapport Senard-Notat intitulé  "l’entreprise, objet d’intérêt collectif", la loi dite PACTE (pour Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises) a complété les articles du Code civil relatifs à l’entreprise. Il a ainsi été précisé que "la société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité". Il a par ailleurs été ajouté que l’entreprise peut se doter d’une raison d’être, et ainsi expliciter la vocation, les engagements et les actions qui guident sa stratégie. Si elle respecte un certain nombre de conditions, la société peut également être qualifiée d’entreprise à mission, ce qui lui permet d’affirmer son engagement dans des missions d'intérêt social et environnemental. Actuellement, il existe en France un peu plus de 1000 entreprises à mission.

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La co-détermination paritaire

La loi PACTE prévoyait également une augmentation du nombre de représentants salariés au Conseil d’Administration des entreprises, mais celle-ci a été extrêmement faible. On est loin de ce qui existe dans beaucoup d’autres pays européens, notamment dans les pays nordiques ou en Allemagne, avec la co-détermination, comme l’a montré Christophe Clerc dans son rapport. En Allemagne, depuis la loi de 1951, une co-détermination paritaire est en effet en vigueur dans les sociétés de plus de 1 000 salariés des secteurs du charbon et de la sidérurgie : les représentants au conseil de surveillance sont désignés pour moitié par les actionnaires et pour moitié par les salariés ; ils désignent ensemble le président du conseil de surveillance, qui n’est ni un actionnaire ni un salarié, et qui a voix prépondérante en cas de partage. Depuis 1952, la loi a été étendue aux entreprises de plus de 500 salariés où les représentants des salariés doivent représenter le tiers des membres du conseil de surveillance. Parallèlement, les conseils d’entreprise, composés exclusivement de représentants des salariés, disposent de nombreux pouvoirs. La meilleure façon pour l’entreprise de tenir compte du bien-être de ses salariés est sans nul doute de rendre incontournable la participation de ceux-ci aux décisions. La co-détermination – qui recouvre de nombreuses formes – est sans doute ce qui le permet le mieux. Dans le  Manifeste travail publié en 2020, nous défendons, avec Isabelle Ferreras, Julie Battilana, et 9 autres collègues, le principe du "bicaméralisme" qui consisterait à mettre à égalité les deux parties constituantes de l’entreprise, les investisseurs en travail et les apporteurs en capital. La forme la plus aboutie du gouvernement démocratique de l’entreprise est cependant la forme coopérative, dans laquelle les salarié.es sont dans le même temps des sociétaires.

La chronique est à écouter dans son intégralité en cliquant sur le haut de la page. Histoire, économie, philosophie >>>  Écoutez et abonnez-vous à la collection de podcasts "Le Pourquoi du comment" ; les meilleurs experts répondent à toutes les questions que vous n'osez poser.

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