Chronique. Les événements climatiques survenus ces dernières semaines ont donné au rapport du GIEC [Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat] toute sa dimension dramatique. C’était donc vrai ! Vrai que les échéances se rapprochent, que le temps nous est compté, que nos sociétés doivent au plus vite s’engager dans la reconversion écologique et prendre les mesures qui s’imposent.
Celles-ci sont en grande partie bien connues : accroître l’investissement public dans la rénovation thermique des bâtiments et les infrastructures d’au moins 20 milliards d’euros par an pendant au minimum dix ans ; transformer notre agriculture de fond en comble ; diminuer drastiquement notre consommation d’énergie et notre empreinte carbone ; adopter des pratiques de sobriété dans nos manières de produire et de consommer.
Nous disposons aussi, à l’échelle nationale, d’une feuille de route, la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), censée dessiner la voie à emprunter.
Mobiliser toutes les disciplines
Mais, pourtant, rien n’est réglé. D’abord, parce que cette feuille de route n’est pas respectée – comme l’a indiqué à plusieurs reprises le Haut Conseil pour le climat – et qu’elle est exagérément optimiste : elle continue en effet à tabler sur la croissance du produit intérieur brut (PIB) alors que celle-ci continue de s’accompagner d’une augmentation des émissions de gaz à effet de serre. Ensuite, parce que la mise en œuvre de cette stratégie est insuffisante.
Enfin, parce que les différents mouvements de résistance qui se sont développés ces dernières années contre ce type de mesures (« bonnets rouges » contre la taxation des poids lourds, « gilets jaunes » contre la hausse du prix des carburants, frondes contre l’installation de parcs éoliens…) risquent de transformer la SNBC en tigre de papier. Pour réussir, il faut engager une véritable révolution de nos politiques publiques.
Nous avons d’abord besoin d’organiser une véritable planification appuyée sur une prospective solide, mobilisant toutes les disciplines et dessinant des scénarios chiffrés intégrant à la fois les ressources matérielles, les évolutions macroéconomiques et celles de l’emploi, et ce, en prenant en compte les questions géopolitiques et les différentes échelles européenne, nationale et régionale.
C’est à cette condition que nous pourrons décider, par exemple, si tous les bâtiments existants doivent faire l’objet d’une rénovation thermique ou s’il est préférable de reconstruire complètement certains d’entre eux ailleurs avec de nouveaux matériaux ; si nous sommes capables de construire des ceintures maraîchères et d’organiser une forme d’autonomie alimentaire pour nos villes ; dans quels territoires il est souhaitable de répartir les nouveaux emplois de la reconversion écologique et de la relocalisation ; s’il vaut mieux ou non conserver l’énergie nucléaire pour nous permettre d’assurer notre indépendance…
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