Le parcours du CETA reste mouvementé en France

Une manifestation contre le CETA

Après son entrée en vigueur provisoire en septembre, l’accord commercial entre l’UE et le Canada fait toujours l’objet d’une large défiance en France, rendant le chemin de la ratification semé d’embuches.

Il n’y aura pas de référendum français pour ratifier le traité commercial entre l’Union européenne et le Canada. Mais le sujet de la ratification et de l’application du  CETA ne cesse de revenir sur la table.

Le 1er février, les députés ont rejeté comme prévu une résolution de La France insoumise demandant la ratification du CETA par referendum, par 73 voix contre 25 et six abstentions. Depuis l’entrée en vigueur provisoire du traité, le 21 septembre dernier, les questions sur la légitimité et la transparence du processus de  négociation commercial de l’UE, le niveau de protection prévu par l’accord et les modalités de ratifications font des remous en France.

Négocié sous les quinquennats de Nicolas Sarkozy puis de François Hollande, le CETA sera finalement entré en vigueur provisoirement sous la présidence d’Emmanuel Macron, qui a promis une vigilance sans faille de la part de la France sur cet accord fondateur de la nouvelle politique commerciale européenne.

Plan d’action du gouvernement

Alors que la ratification progressive du CETA suit son cours en Europe, côté français, la mise en place d’un plan d’action  gouvernemental pour la mise en œuvre de l’accord devait paver le chemin.

Fin octobre, ce plan d’action de 65 mesures  élaboré sur la base des conclusions d’une commission d’évaluation indépendante devait permettre de faire le suivi des enjeux environnementaux et sanitaires découlant de l’accord.

« On veut montrer avec ce plan d’action qu’on souhaite une politique commerciale exigeante » a déclaré Jean-Baptiste Lemoyne lors d’une audition à l’Assemblée nationale le 22 novembre, reconnaissant que  « sans confiance de l’opinion publique, aucun agenda commercial ne pourra être porté dans le temps ».

Mais depuis, le plan d’action semble avoir eu peu de conséquences. « Le plan d’action du gouvernement, c’est une coquille vide » affirme  Karine Jaquemart de Foodwatch.

« Où en sont les mesures prévues pour concrétiser le véto climatique, pour anticiper la taxation des énergies fossiles les plus polluantes, pour assurer le suivi des effets sur nos agriculteurs ? » a demandé le député En Marche Mathieu Orphelin, lors d’une séance de question avec le gouvernement le 31 janvier.

La France rêve d'introduire un veto climatique au CETA

Le gouvernement a présenté le 25 octobre un plan d’action sur les enjeux sanitaires et environnementaux du CETA. Mais les propositions françaises ne peuvent s’appliquer qu’avec l’accord de l’UE et du Canada.

Pour l’heure, les mesures prévues par le plan d’action du gouvernement sont toujours en discussions, selon le  Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Baptiste Lemoyne.

Sur la question du veto climatique,  « la Commission et le Canada ont donné leur accord de principe », a-t-il expliqué aux députés. « Et nous travaillons au suivi scrupuleux des engagements environnementaux. Des mesures très concrètes seront annoncées d’ici quelques semaines » a-t-il poursuivi.

Au niveau européen, la coopération réglementaire avec le Canada dans le cadre du CETA devrait également évoluer. La Commission a lancé une consultation publique visant à identifier les secteurs d’intérêt à traiter dans le cadre d’un forum de coopération réglementaire, un outil mis en place pour garantir discuter – entre autres – des enjeux de  sécurité alimentaire et de protection dans le cadre du CETA.

Le vote négatif 

La question d’un éventuel rejet de la part des parlementaires français demeure elle aussi en suspens. Avec l’entrée en vigueur provisoire, la vaste majorité de l’accord s’applique déjà, et seules quelques dispositions (tels que les tribunaux d’arbitrages) doivent effectivement attendre le vote de l’ensemble des parlements nationaux pour s’appliquer des deux côtés de l’Atlantique.

Une situation qui agace côté parlementaire. Depuis le 21 septembre, « environ 90% des mesures prévues dans ce traité sont appliquées » a rappelé  la députée Clémentine Autain (La France insoumise), lors du débat à l’Assemblée.

Pour les députés, chargés de ratifier au second semestre 2018 les 10% restant, la question de la portée d’un éventuel rejet pose aussi question.

«  C’est la grande question mystère. Un vote négatif bloquerait évidemment les dispositions qui ne sont pas encore entrées en application, mais l’effet est plus incertain pour le reste » explique Mathilde Dupré de l’Institut Veblen.

Côté français, un rejet parlementaire engendrerait une suspension de l’accord dans son intégralité, a confirmé Jean-Baptiste Lemoyne aux députés. Mais au niveau européen, le son de cloche est différent.

La commission française sur le CETA rend son rapport

À deux semaines de l’entrée en vigueur provisoire de l’accord commercial entre l’UE et le Canada,  les résultats d’une commission spéciale ont été transmis vendredi 8 septembre au Premier ministre. Mais le flou persiste sur la suite à donner aux conclusions.

« Lors de son audition à l’Assemblée nationale, le commissaire européen Pierre Moscovici nous a répondu que le CETA continuerait à s’appliquer » en cas de rejet d’un des parlements nationaux, a rappelé Clémentine Autain. « Comment pouvons-nous accepter un tel déni démocratique ? » a-t-elle interrogé.

Pour l’heure, 8 pays européens ont déjà ratifié le CETA : la Croatie, le Danemark, l’Espagne, la Lettonie, Malte,  la République tchèque, l’Estonie et le Portugal.

 

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